Interview




Vois tu le monde en dessin ? Vois-tu les gens en cartoon ?

J’ai l’impression que non, mais je surprends souvent mon index qui griffonne à vide sur l’accoudoir d’un fauteuil ou sur ma cuisse, comme par automatisme. Comme si ma main était possédée à mon insu ! J’ai donc un vrai tic d’interprétation perpétuel du réel…


Quand as-tu commencé à dessiner ?

Il y a suffisamment longtemps pour que je ne m’en souvienne pas. Mon parcours de gribouilleur n’a rien d’original : je caricaturais les profs à l’école. Très silencieux quand j’étais petit, je m’exprimais par le dessin, sans discipline graphique de prédilection. Jusqu’au jour où je suis tombé sur une caricature « bluffante » de JohnWayne. Révélation ! Je me suis mis à caricaturer en boucle. La maturité venant, j’ai mis en scène ces personnages et j’ai glissé vers le traitement de l’actualité…


Quels sont les sujets qui t’inspirent le plus ?

J’aime autant traiter la politique que la vie artistique. Mais dans nos métiers de presse, ce qui inspire le plus est forcément l’actu brûlante, pour la dose d’adrénaline qu’elle procure. De ce point de vue, je n’ai ni l’esprit ni le rythme d’un dessinateur de BD. Par ailleurs, les sujets qui inspirent sont ceux qui révoltent. Une atteinte aux droits de l’Homme ou une élection piétinée incitent immédiatement à réagir. Par contre, les sujets trop “évidents”, traités par tout le monde, peuvent être paralysants. Quand je ne suis pas dans l’urgence, je reviens souvent à mon amour du ”portrait-charge”. « Tiens, je me farcirais bien untel ou untel au petit déjeuner » ; parfois parce que la personne m’énerve ; plus souvent parce qu’elle m’inspire de l’empathie.


À voir le nombre de caricatures que tu fais, on dirait que tu dessines comme tu respires…, tu trouves toujours l’inspiration ?

Le dessin occupe la majeure partie de mon temps de travail et comme c’était à l’origine un loisir, ça déborde aussi sur le temps dédié à la vie privée. Alors, oui, je dessine un peu comme je respire. Il y a des dessinateurs plus compulsifs que moi, qui ne peuvent pas épargner une nappe de restaurant. Je ne suis pas aussi obsessionnel, mais le dessin accompagne tout de même ma vie au quotidien. Pour ce qui est de l’inspiration, dessiner est comme pratiquer un sport. Plus on est échauffé et régulier dans la pratique, plus ça semble simple, même s’il y a un niveau de saturation (quand il faut commencer à faire un dessin de la main droite et un autre de la main gauche…). Pour le coureur du dimanche, le troisième kilomètre et plus douloureux que le trentième du marathonien expérimenté.  Sur la dimension intellectuelle d’une “œuvre”, certains pensent même qu’il y a une sorte de mécanique bien huilée qui se met en place, avec quelques “trucs” inavouables… La répétition ne serait donc pas paralysante. Théorie pas très romantique…

Combien de temps te faut-il pour dessiner  une caricature ?


Ça prend entre trente minutes et… 24 heures. Tout dépend de l’inspiration, du décalage satirique que l’on va trouver fasse à un sujet. C’est donc la conception “intellectuelle” qui peut bloquer le dessinateur, plus que la réalisation. Il y a bien sûr des choses graphiquement complexes à dessiner : un gouvernement en entier, une cathédrale baroque, la coiffure de Matthieu Chédid, etc. Un travail de fourmi allongera forcément le temps passé sur la planche. Mais, en moyenne, un dessin est “plié” en moins de deux heures. C’est le délai que j’indique à un journal qui veut passer commande. Ça me semble un timing, la plupart du temps, “sécurisant”.


Comment travailles-tu ? Sur ordinateur ?

L’ordinateur est accessoire. Il me sert à deux choses : en aval, la transmission des dessins par Internet, ce qui permet de travailler avec plusieurs continents. En amont, en terme de réalisation, c’est essentiellement une “béquille” pour la colorisation, sachant que je ne sais pas tenir un pinceau. Mais le cœur du travail reste manuel, en l’occurrence le crayonnage puis l’encrage. La couleur est de plus en plus requise pour les magazines, mais elle ne saurait sauver un mauvais dessin. Elle le rend parfois plus lisible, lui donne un peu de relief. Elle peut aussi l’étouffer… Bref, tout commence invariablement par une feuille blanche, un crayon et quelques métacarpiens…



À voir le nombre de caricatures que tu fais, on dirait que tu dessines comme tu respires…, tu trouves toujours l’inspiration ?

Le dessin occupe la majeure partie de mon temps de travail et comme c’était à l’origine un loisir, ça déborde aussi sur le temps dédié à la vie privée. Alors, oui, je dessine un peu comme je respire. Il y a des dessinateurs plus convulsifs que moi, qui ne peuvent pas épargner une nappe de restaurant. Je ne suis pas aussi obsessionnel, mais le dessin accompagne tout de même ma vie au quotidien. Pour ce qui est de l’inspiration, dessiner est comme pratiquer un sport. Plus on est échauffé et régulier dans la pratique, plus ça semble simple, même s’il y a un niveau de saturation (quand il faut commencer à faire un dessin de la main droite et un autre de la main gauche…). Pour le coureur du dimanche, le troisième kilomètre et plus douloureux que le trentième du marathonien expérimenté.  Sur la dimension intellectuelle d’une “œuvre”, certains pensent même qu’il y a une sorte de mécanique bien huilée qui se met en place, avec quelques “trucs” inavouables… La répétition ne serait donc pas paralysante. Théorie pas très romantique…